01/11/2025


Portraits d'habitants influents : Coise-Saint-Jean-Pied-Gauthier sur la scène régionale et nationale

Une terre, des noms, des histoires : les racines de l’engagement savoyard

À l’ombre des vignes et sous le regard patient des Bauges, Coise-Saint-Jean-Pied-Gauthier paraît d’abord un paisible village du Val Gelon, où la vie suit le rythme des saisons, des vendanges et des fêtes de village. Pourtant, derrière ces chemins familiers, le territoire porte l’empreinte d’habitants dont l’influence a dépassé très largement les frontières communales. Il n’est pas rare, dans les archives ou au détour d’une conversation, d’entendre évoquer ces noms d’hier qui ont contribué à écrire l’histoire de la Savoie — et parfois, de la France.

Pour explorer ces figures, il faut naviguer entre mémoire populaire et archives municipales, frôler les vitraux de l’église Saint-Jean-Baptiste, ou feuilleter les vieux registres du pays. De la politique à la Résistance, de la vigne aux bancs de l’Assemblée, leur héritage est discret mais profond.

Les bâtisseurs de la République : élus et figures politiques de Coise-Saint-Jean et du Val Gelon

Ce n’est qu’à partir du rattachement de la Savoie à la France, en 1860, que la contrée de Coise s’est vue représentée sur la scène politique nationale. Mais certains personnages locaux ont su se distinguer dans l’histoire politique régionale.

  • Joseph Vernay (1830-1902) Issu d’une vieille famille établie dans le village, Joseph Vernay a d’abord été maire de Coise. Son nom apparaît dans les annales pour avoir soutenu activement le mouvement d’intégration de la Savoie à la France, lors du plébiscite de 1860. Il siège à plusieurs reprises au Conseil général de la Savoie, s’engageant pour le développement des routes et l’enseignement sur le territoire (source : Archives départementales de la Savoie, dossiers du Conseil général). Sa passion pour l’école laïque le mettra en opposition avec l’ordre ecclésiastique local, particulièrement actif à cette époque.
  • Jean-Baptiste Dumoulin (1890-1963) Viticulteur passionné, président de la caisse locale de la Mutualité agricole avant la guerre, il devient maire de Coise-Saint-Jean-Pied-Gauthier à la Libération. Son action fut déterminante dans l’électrification complète du village dans les années 1950 et la modernisation des réseaux d’eau potable, deux dossiers qui ont changé la vie et l’avenir des habitants (source : Archives communales de Coise-Saint-Jean-Pied-Gauthier).

Résistants et Justes : la Savoie des heures sombres

La Savoie, terre de passage et d’exil, fut aussi une terre d’engagement et de courage durant la Seconde Guerre mondiale. Si Coise-Saint-Jean-Pied-Gauthier n’a pas eu de grande figure nationale de la Résistance, plusieurs habitants ont joué leur rôle, au prix du risque et parfois de l’exil.

  • Père Louis Roch (1910-1987) Curé du village pendant la guerre, il organisait le passage de familles juives et de réfractaires au STO (Service du Travail Obligatoire), utilisant l’église comme point de relais secret avec le maquis des Bauges. Plusieurs témoignages d’anciens du village (collectés dans Savoie et Résistance, éditions La Fontaine de Siloé) évoquent son sang-froid et sa discrétion face à la pression allemande. Il fut nommé Juste parmi les Nations en 1992, à titre posthume.
  • Simone Berriel (1922-2011) Née à Coise, elle s’engage dans le réseau « Résistance-Fer » qui sabotait les lignes ferroviaires reliant Chambéry à Albertville. Suite à une dénonciation, elle dut fuir et ne retrouva le village qu’en 1945 où elle sera élue conseillère municipale, l’une des premières femmes à siéger (source : interview dans Le Dauphiné Libéré, 12 mai 1999).

Patrimoine vivant : des prêtres, des viticulteurs et des passeurs de mémoire

Si certains noms sont sur les plaques de rues ou dans les mémoriaux, d’autres n’ont parfois laissé que des traces diffuses : une pierre sculptée, un récit transmis lors d’une veillée. Pourtant, leur impact est bien réel dans l’histoire commune.

  • Léon Gachet (1876-1954) Instituteur de village, il fut aussi un inlassable collecteur de conteurs et de traditions orales. Ses cahiers, aujourd’hui conservés aux Archives départementales, ont sauvé de l’oubli de nombreux récits sur la vie rurale. À la fin de sa vie, on le retrouve conseiller municipal et promoteur d’un musée des traditions locales, projet finalement repris par la communauté de communes en 1978.
  • Marie Favre Première femme vigneronne indépendante du village, installée dès les années 1970, elle défend l’appellation "Vin de Savoie - Coise", à une époque où beaucoup de petites vignes disparaissent. Ses efforts pour l’organisation de la fête du village et la redynamisation du marché hebdomadaire font d’elle un personnage-clé du renouveau économique local (source : Le Progrès, 1986).

Des parcours d’exception, une histoire partagée

À travers l’histoire de ces hommes et femmes, on saisit toute la subtilité de ce que le “local” peut signifier : un ancrage, un engagement parfois discret, mais déterminant à l’échelle d’un territoire. L’histoire n’est pas toujours celle des grandes figures aux noms gravés dans la pierre, mais aussi celle de ces destins modestes qui, par leurs choix, ont su défendre un mode de vie, porter des valeurs de solidarité ou transmettre une identité.

Quelques repères pour aller plus loin

  • Où trouver des informations complémentaires ?
    • Les archives communales de Coise-Saint-Jean-Pied-Gauthier : registres municipaux, délibérations, recensements anciens.
    • La bibliothèque du Département de la Savoie, à Chambéry.
    • Ouvrages : Savoie et Résistance (La Fontaine de Siloé), Mémoires rurales en Val Gelon (Musée de Savoie).
    • Les anciens du village, précieux détenteurs de la mémoire orale.

Bref écho du présent…

L’histoire des villages savoyards ne se résume pas à un passé figé. Elle se tisse, chaque jour, à travers les petites décisions, les souvenirs et l’attachement aux détails du quotidien. Parmi les sentiers et les coteaux, certains noms résonnent encore, rappelant que toute commune, même discrète, peut porter en elle la trace de vies engagées, utiles à la collectivité, parfois héroïques à leur échelle.

À chacun de guetter, lors d’une promenade ou d’une discussion avec un voisin d’ici, les échos de ces figures, qui sont autant de filaments vivaces dans la trame de la grande Histoire des Savoie.

En savoir plus à ce sujet :